Austérité : idéologie néolibérale abrasive

Dans le contexte actuel, il n’est plus possible de financer des sorties éducatives pour les enfants des CPE.

Dans le contexte actuel, il n’y a plus assez d’argent pour acheter de nouveaux livres pour les bibliothèques des écoles primaires.

Dans le contexte actuel, il n’y a plus d’autre option que d’intégrer les élèves en difficulté et handicapé.e.s dans les classes ordinaires.

Dans le contexte actuel, il est inévitable d’augmenter les frais d’inscription et les frais de stationnement pour les étudiantes et étudiants des cégeps.

Dans le contexte actuel, il devient inéluctable de fermer des lits dans les centres de réadaptation et de renvoyer directement chez elles les moins fragiles des personnes âgées.

Dans le contexte actuel, il est essentiel de subventionner à la hauteur d’un milliard une compagnie d’aéronautique pour assurer la relance économique en créant une poignée d’emplois.

Dans le contexte actuel, il est routinier qu’un organisme communautaire doive organiser une collecte de fonds d’urgence pour éviter de mettre à pied les quelques intervenant.e.s qu’il lui reste.

Dans le contexte actuel, il est impensable de conserver dans nos universités ces dizaines de programmes trop abstraits qui ne répondent pas aux besoins concrets des entreprises privées.

Dans le contexte actuel, il est indispensable d’augmenter le salaire des médecins pour les retenir au Québec.

Dans le contexte actuel, il devient nécessaire que des professeur.e.s de cégep sacrifient des journées de salaire pour maintenir la qualité des services à la communauté étudiante.

Dans le contexte actuel, le service de garde ne peut plus fonctionner sans doubler ses tarifs et il devient plus rentable pour plusieurs femmes de rester à la maison avec leurs enfants.

Dans le contexte actuel, il est normal de considérer comme superflues des campagnes de publicité pour promouvoir l’égalité des genres et la lutte contre l’homophobie.

Dans le contexte actuel, on paye plus pour avoir moins. Parce qu’il n’est plus possible de faire des coupures sans toucher directement la qualité des services publics, mais qu’il n’est plus possible d’augmenter les tarifs de ces services sans remettre en question leur accessibilité.

Le contexte demeure actuel depuis 2014. Il reste actuel même si le gouvernement parle d’une nouvelle période de prospérité, qu’il se félicite de ses « réinvestissements massifs ». Parce que la réinjection de 80 millions en éducation primaire et secondaire ne peut espérer effacer 417 millions de coupes.

Censé être temporaire, le contexte est actuel depuis plus de deux ans parce que la poursuite d’objectifs pointus comme l’élimination du déficit budgétaire et le remboursement de la dette ne peut se justifier en matière d’économie. Non seulement, l’état des finances publiques ne légitime pas la prise de mesures draconiennes, mais le désengagement de l’État dans le secteur public au profit du secteur privé ne constitue pas une mesure de relance économique viable : cela fait péricliter l’économie tout en aggravant les inégalités. Comme de fait, compressions après compressions, les cibles de croissance du PIB sont systématiquement manquées et l’économie stagne, parce que l’État abandonne son rôle de multiplicateur des richesses. « L’État ne crée pas d’emplois directs », dit-on en congédiant infirmières, enseignantes, orthopédagogues, éducatrices, psychologues, fonctionnaires.

Le contexte actuel demeurera actuel parce que la réingénierie de l’État se veut permanente. L’État est dit trop gros et inefficace et les services publics sont dits trop lourds pour le portefeuille des contribuables, particulièrement en temps de crise économique. La seule solution proposée est de réduire la taille de l’État en éliminant et en fusionnant des agences, des organismes, des commissions, des services. Tous les pouvoirs sont redirigés entre les mains des ministres, qui se retrouvent avec des monopoles de décision sans précédent. Cette concentration verticale favorise la stabilité au détriment de la démocratie, ce qui entérine la pérennité de l’austérité : une position idéologique qui ne peut fonctionner qu’en limitant les revendications des populations les plus vulnérables, les plus touchées par la « rigueur » budgétaire.

Dans le contexte actuel, il est essentiel de ne pas croire en cette nouvelle stabilité qu’on nous propose en enterrant les voix de ceux et celles qu’on refuse d’aider. Il est important d’analyser les choix budgétaires et de réaliser qu’ils ne sont ni justes ni objectifs. Surtout, il est capital de se souvenir que la démocratie ne se résume pas à un vote tous les quatre ans, mais en un constant questionnement du bienfondé des actions du gouvernement.